Cliché

un homme

dimanche 11 mars 2007, par youkou


Dehors je regarde ces gens qui passent et que je ne reverrai pas, peut-être pas. J’adore ça et comme tu sais, le métro fait parti de l’outil. Je les vois et je leur invente une vie, des ennuis et des bonheurs, des amis ou un célibat à plein temps.
Il y avait beaucoup de famille pour son premier jour de sortie. Il répond à l’appel que je lançais tout l’hiver en chantonnant les Massilia, Compay, Sinsé et bien plus encore qui nous disent qu’elle est bleue et qu’on veut tous du soleil. Soleil. C’est ce qui s’est passé aujourd’hui dans la vie d’un homme. Du soleil.
Je regarde beaucoup les hommes, ils m’intriguent et j’aime les observer, objectivement, de ces reflexes qu’ils n’ont pas et une tendresse si malhabile. Fin et superficiel. Ils touchent.
Assis sur un banc (c’était le printemps… non pas encore), son regard traine sur cette population qui promène chien et bestiau comme on promène son enfant, sans laisse. Deux roues, trois et quatre roues, des cordes et élastiques, cerceaux et ballons, casquettes, lunettes et serviettes. On s’y croirait presque sur les bans de sable, sans sable.
Je n’avais pas vu cette femme, à ses côtés, qui s’appuie sur son bras qui l’enroule et qui la love. Le mot est juste, je pense, lover, s’enfoncer physiquement dans l’amour, sans pénétration. N’ouvre pas ton Larousse, ce n’est pas la définition.
Ils ne parlent pas et si j’avais dû animer ce cliché, il y aurait eu une couleur particulière pour chacun de leur karma. Anaïs m’obsède, ah les enfoirés !
Puis elle se lève, c’est un jogging du soir qu’elle porte, une sorte pyjama pour toute occasion, pour un chez soi. Je me rends compte que je n’avais pas encore fait attention à sa tenue vestimentaire, cet homme me fait sourire. Il porte un short si laid qu’ils ont dû entamer une guerre des polochons tôt ce matin, avec pour tout aboutissement, un compromis ménager, vaisselle ou repassage. Bleu et rouge, des rayures noires sur le côté, façon Adidas, sans marque, Dieu, que je la comprends ! Quoiqu’ils se marient bien, je les trouve beaux.
Elle se met accroupie, face à lui, il se voute alors pour être à sa hauteur, il n’y a aucun signe de dominant/dominé, je ne ressens que du respect, mutuel. Crédit à vie. Sa bouche forme des mots, ils bullent en sa direction, comme dans une bande-dessinée où les phrases prennent le temps de la lecture pour mettre le point d’exclamation au final ou les trois petits points pour tendre le suspens. Là, il y a les trois petits points.
Elle a mis pour l’occasion, le rouge à lèvre crémeux que lui a offert sa meilleure amie, crémeux pour qu’il puisse les lui dévorer. Pas d’autre maquillage, peut-être un infime trait noir sous les yeux, et encore, je suis trop loin, j’imagine.
Ses lèvres marquent donc cet arrêt rempli d’interrogation… Elle vient de lui dire quelque chose qui le brusque, le pousse, le caresse. De cette violente agitation, je ne sais pas encore s’il va la blottir contre lui ou bien lui en décocher une. Si fort. Puis comme elle, son visage se détend, ses fossettes se désemplissent et la ride est loin. Il prend sa femme à pleine main, une sorte de possession que toutes nous nous y laisserons emporter. Une appartenance à quelque chose, quelqu’un, c’est extrême, un but commun, je vois déjà à travers eux une maison, un jardin et les oiseaux qui chantent, eux aussi, ils ont vomi dans leur corn-flakes.
Si son ventre n’était pas déjà rempli, ils nous en auraient fait un autre, Parc de la Poudrerie. Il va être papa.

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