Un voile de brume, les feuilles tombent, c’est commun, peu banal pour un mois où les têtes de chiots migrent sur les bords de plage.
Je m’en suis rendue compte alors que la chatte, les pattes pleines de boue et de feuillages, rentrait à la maison. Je passe la tête dehors et une voix au loin chante Norah Jones
, j’entends aussi quelqu’un d’autre, de l’autre côté du continent…
. Bordel, ça donne le blues. Je prends, étendue sur le séchoir, la couverture polaire que j’ai ressortie pour ces occasions, grisitude. Elle s’enroule, mes pensées aussi.
Une drôle de sensation que de ne plus jouer ce rôle de maman quotidiennement, je perds un peu de moi. Puis y’a toi aussi, ma plus belle amie qui part sans rien dire, un peu comme le Léon de la chanson, y’a le gars du bistrot qui s’est pointé et on ne l’a plus jamais revu. Putain d’amour ! Putain de temps.
Je ne crois pas à ces maladies qui poussent ton corps à pleurer et à se détruire, pourtant je sais qu’il n’est pas question que de volonté. Faiblesse d’esprit. Il y a un magnétophone, côté gauche du cerveau, il fait parti de la fibre artistique de l’être, qui répète en cas de gros nuages « tu es forte ». Ca va faire un peu prétentieuse mais je te le dis net : je suis forte.
J’enfourche le deux roues, allume cette belle bécane qu’est le Ipod, je ferme les yeux un demi instant et déjà tout est derrière-moi Ska-P
m’entraîne loin sur les chaînes montagneuses, côté Ibérique.
Je suis amoureuse de ces accents, de ces parlés qui te réchauffent, de ces rythmes sensuels qui te déshabillent promptement, qui te détachent les cheveux et toi le corps arqué au soleil qui déverse sur tes hanches des rayons, doux, francs. Tu es ouverte à la brise, au ciel, et ces parfums qui te pénètrent.
C’était un demi instant, avant d’entamer les coups de pédale.
Sur mes roues, je suis toujours heureuse, toujours. Je respire l’air, à grande vitesse j’ai cette impression de vivre beaucoup plus qu’à terre, à l’arrêt. Avoir ce besoin d’être en osmose avec cette planète qui te fait tourner la tête. J’oublie tout, et de regarder les voitures parquées qui démarrent sans regarder, une chance, je l’ai aux oreilles
.
Le « voile de brume » et le vent à contresens se lèvent, je force comme je pousserais le destin.
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